Extrait de « vers la plus Queer des insurrections »

PAR LE GANG MARY NARDI
février 2009

Une proposition de définition du terme « Queer » dans « Vers la plus
queer des insurrections”, traduction de Queer ultraviolence,
anthologie du mouvement états-unien queer insurrectionnaliste
bash back! par Fray Baroque et Tegan Fanelli.

« Certain.e.s liront ‘’queer’’ comme synonyme de
‘gay et lesbienne » ou ‘LGBT »‘. Cette lecture est
inadéquate. Alors que celleux qui s’intègrent le
mieux dans les constructions de « L »‘, « G »‘, « B »
ou « T » pourraient tomber dans les limites
discursives du queer, le queer n’est pas une zone
d’occupation stable. Le queer n’est pas
simplement une énième identité qui peut être
punaisée sur une liste de catégories sociales
nettes, ni la somme quantitative de nos identités.
Il s’agit plutôt de la proposition qualitative de
l’opposition aux présentations de la stabilité – une
identité qui problématise les limites maîtrisables
de l’identité.

Le queer est un territoire en tension, défini en
opposition au récit dominant du patriarcat
blanc-hétéro-monogamme, mais aussi en affinité
avec tout.e.s celleux qui sont marginalisé.e.s,
exotisé.e.s et opprimé.e.s. Le queer, c’est ce qui
est anormal, étrange, dangereux. Le queer
implique notre sexualité et notre genre, mais va
bien au-delà. Il incarne notre désir et nos
fantasmes, et bien plus encore. Le queer est la
cohésion de tout ce qui est en conflit avec le
monde hétérosexuel capitaliste.

Le queer est un rejet total du régime de la
Normalité. »


TDoR 2024 – Prise de parole

Texte de notre prise de parole au TDoR 2024 à Rennes

En cette journée de commémoration de nos morts et mortes, nous savons que la tristesse est la première émotion qui nous vient. Bougie, couronnes de fleurs… On repense à celleux qu’on a perdu-e-s, celleux qui sont passés pas loin, et aux deuils à venir.

Vivre Trans, c’est vivre avec la connaissance que nous, nos proches et/ou nos adelphes seront opprimé-e-s, agressé-e-s, humilié-e-s, régulièrement assassiné-e-s.

350 d’entre nous tués en un an. Parmi ces victimes, un peu moins de la moitié étaient Travailleureuses du Sexe. Une propotion qui diminue graduellement chaque année depuis 2008. Non pas qu’ils tuent moins les TDS, les assassins s’attaquent surtout de plus en plus à d’autre catégories. De plus, beaucoup des victimes sont jeunes, 1/3 avait entre 31 et 40 ans. 1/4 entre 19 et 25 ans. Également, 15 mineurs assassinées.

Toujours plus de mortes, et pourtant les situations sont si familières : Essentiellement des femmes trans non-blanches et notamment noires. Près d’une sur deux travailleureuse du sexe.

Et comment être surprise quand partout dans le monde, notamment occidental, le fascisme gonfle, avance, prend le pouvoir. C’est lui, le fascisme, qui peint toujours une cible dans le dos des mêmes : femmes, TransPédéGouineInter, travailleuses du sexe, personnes racisées.

C’est en s’appuyant sur ses piliers du patriarcat et du racisme que cette idéologie mortifère nous marginalise, fait de nous des bizarres, des innacceptables,.. des queers.

Mais bien souvent aussi, des dispensables, des dérangeantes… des dérangées. Toustes le savent bien : dans nos communautés de marginalisé-e-s, il y a beaucoup de personnes handicapé-e-s, beaucoup de personnes folles. Aujourd’hui, extrême centre, néo-libéraux et fascistes travaillent main dans la main pour organiser la mise au travail de gré ou de force. Une nouvelle « loi immigration » annoncée pour 2025. La violence contre les pauvres en criminalisant toujours plusse les SDFs et les squatters notamment. Aux handicapées rejetées par un monde du travail toujours plus violent, le gouvernement entend proposer le suicide, avec l’appuie même des forces politiques de gauches.

Des année-e-s qu’on hurle : « plus jamais ça ! », « assez ! », « pas une de plus ! ».

Chaque année il est de plus en plus clair que ni nos cris, ni nos larmes, ni notre sang ne les feront bouger. Il n’y a rien à attendre des institutions qui au mieux nous donnent moins que des miettes.

Alors pour avancer, il faudra aussi s’attaquer au validisme et au sanisme.

Trêve de constat. Maintenant on fait quoi ? Répondons à l’unisson : ORGANISONS-NOUS !

Il est plus que jamais urgent de donner de la substance au mot communauté que nous utilisons toustes tant. C’est par l’auto-gestion que l’on gère le mieux nos transitions médicales. Par l’autonomie dans le TDS que l’on trouve notre subsistance. C’est dans la solidarité que réside notre résilience. C’est dans le collectif qu’éclot notre pouvoir.

Et puis, sortons les crocs !

A force de voir les mêmes atrocités se reproduire, voire empirer, sans rien pouvoir y faire, on sombre. On doit réussir a attaquer ceux qui nous attaquent. On doit cibler nos objectifs, savoir pourquoi on les attaque, et y aller fort pour ne plus laisser exister ce qui nous tue. Le 25 novembre au soir, attaquons la Nuit du Bien Commun, un événement de milliardaires anti-IVG, anti-trans, qui vient tranquillement diffuser ses idées morbides à Rennes. Attaquons les pseudos soignant.es qui nous pourrissent la vie et nous empèchent d’aller mieux quand le monde nous déboite trop : médecins, psychiatres, endoc’… on a toustes des expériences de merde avec certain.es d’entre eux… Alors empêchons les de continuer à agir de la sorte !

Attaquons les collectifs abolitionnistes, qui foutent dans la merde les plus précaires de nos communautés : Amicale du Nid, Osez le Féminisme, ça dégage de Rennes !

Attaquons le racisme systémique et ceux qui le représentent, ceux qui valident et utilisent les frontières pour arme d’oppression des personnes racisé.es !

Attaquons Thales, Carrefour, qui soutiennent un
génocide de masse, attaquons Apperé qui laisse
les migrant.es à la rue !

A nos ennemis : ne confondez pas nos larmes avec de l’impuissance. Sous notre tristesse bouillonne la rage de changer cette société dégueulasse qui nous marginalise et voudrait nous voir nous cacher, sinon disparaître. Nous ne sommes pas des victimes par essence. A leur projet politique infecte, nous répondrons par la force de l’organisation et de la solidarité.

Nous sommes Queer, vénères et révolutionnaires.

Votre monde tombera.
Nous le démantèlerons.
Brique par brique, mur par mur…

Tremblez, on arrive.

TDoR 2023 – Prise de parole

Les politiques guerrières, fascisantes et colonialistes sont transphobes.

Les luttes décoloniales et anti-impérialistes peuvent libérer et sauver des personnes trans.

Imaginez.

Des cadres de vie bouleversés par la guerre. Des vies trans et enbies bouleversées par la guerre. Pour les personnes transfems, il y a le risque qu’elles-se fassent enrôler pour le front. Parmi les hommes, cis bien entendu. Une société patriarcale attend d’être à genoux avant de confier sa défense à des femmes. Mais elles seront des femmes, trans, subissant la transphobie de leurs « frères d’armes*, et les horreurs de la guerre.

Mais même en n’étant pas envoyé-es au front nos adelphes subissent les bombardements, les rationnements, notamment sur les médicaments, les lois martiales, et les réactions LGBTIphobes émergeant ou s’amplifiant.

Leurs existences sont de toute manière instrumentalisé-es, tout autant par des camps politiques se prétendant leurs défenseurs mais qui n’ont en tête que du pinkwashing nationaliste pour faire d’elleux des bon’nes patriotes ; que par des camps politiques les étiquetant comme adversaires intérieur-es comme exterieur’es, déviant’es, ennemi-es des valeurs traditionnelles et de la Patrie. Intégrismes religieux et discours déshumanisants sont toujours bien pratiques pour justifier des pires sévices. Flicage, exclusion de l’espace public, thérapies de conversion, ou pire encore. Nos adelphes craignent pour leur vie, pour la vie de leurs proches, iels craignent l’occupant et ses exactions. Iels craignent l’occupant et ses velléités colonisatrices.

Car le colonialisme n’apporte que fractures et violences malgré ses prétentions d’apport du progrès, d’une bonne morale, voire de “civilisation », tant qu’il y est. Il instrumentalise à nouveau l’existence de nos adelphes trans, pour assoir sa domination. Soit il se sert d’elleux comme tokens pour déshumaniser un peuple, ou les présentent comme des êtres à sauver de leur propre peuple ; soit il encourage la transphobie à leurs égard et c’est alors elleux qui sont déshumanisé-es.

Le colonialisme n’est jamais émancipateur, malgré ses plus beaux masques et images de propagande pailletés. Il peut autant effacer l’existence des trans et plus largement des LGBT, comme il peut opposer nos adelphes : entre colons et colonisé’es, bon’nes trans, mauvais-es trans, civilisé-es, sauvages.

Le LGBT colon, il vient en soldat poser fièrement, drapeaux arc-en-ciel à la main, sur les ruines d’une ville qu’il vient raser, après avoir massacré sa population.

Parmi cette population : des queers, des trans, nos adelphes: Voilà à quoi ressemble la libération LGBT promise par le colon se prétendant défenseur des LGBT, qui les écrase sous ses bombes “Au nom de l’Amour”.

Mais revenons aux personnes trans. Imaginons qu’elles parviennent à fuir leur pays en guerre, et qu’elles se retrouvent à la frontière, face aux gardes, présentant leurs papiers. Que leur identité, prénom et genre soient à jour ou non sur leurs papiers, nos adelphes risquent les humiliations, le rejet, les violences. C’est systématique. C’est déjà la merde les papiers quand t’es trans, alors imaginez pour les trans réfugié’es, avec ou sans papiers.

Qui sait, cette violence ou les politiques internes du pays à passer les forceront à la clandestinité. Et après le passage des frontières, si elles parviennent à les passer, les galères continuent. L’enfer administratif que rencontrent toute personne exilée est à nouveau plus complexe avec des papiers mal adaptés, quand papiers il y a. Les violences administratives, qu’elles soient d’ordre racistes, transphobes, ou les deux, la violence des camps de réfugié’es, etc, nos adelphes les subissent tous les jours.

Imaginez, les flics qui les traquent, les contrôlent, et peuvent de-les jeter dans un CRA, un Centre de Rétention Administrative. C’est un joli nom pour parler de camp de concentration pour personnes exilées avant leur expulsions vers le pays qu’elles ont fui. Si ces gens ont quitté-leur pays c’est bien souvent pour y fuir la guerre, la répression, et bien souvent dans le cas de nos adelphes, les LGBTIphobies, et dans le cas des personnes trans, la transphobie.

Oui des adelphes sont expulsé-es vers la mort, c’est une réalité. Les frontières et les politiques migratoires tuent. En cela les frontières et les politiques migratoires, non contentes d’être racistes et assassines, sont LGBTIphobes, et transphobes.

Et même si ces adelphes exilé-es arrivent à rester sur le territoire, voire parviennent à être régularisé’es, iels ont tout risque de subir les politiques fascisantes qui font leurs choux gras dans bien des pays dits progressistes, développés, en paix. Les tafs précaires, les agressions de rue sont le quotidien des trans exilé-es. Leurs taf et leurs capacités de revenus sont attaquées et complexifiées. Les rares lieux, réseaux et communautés de soutien existant seront souvent ignoré-es par beaucoup de gens. Nos adelphes sont délogé-es quand les flics viennent expulser leurs camps de fortune avec la violence policière qu’on leur connaît, ou quand-ces mêmes sales flics viennent péter les squats queers qui offraient un peu de logis et de soutien. Nos adelphes ont moins sinon pas du tout accès aux réseaux de soin et de santé, et ça les met d’autant plus en danger et en détresse.

Toutes les politiques répressives envers les exilé-es sont transphobes, parce que les populations trans ont bien des raisons de vouloir fuir et passer des frontières dans l’espoir d’une vie meilleure.

Toutes les politiques participant au maintien et au renforcement de nouvelles frontières sont des attaques directes contre nos adelphes. Chaque mur, chaque rideau de fer, chaque grillage barbelé ainsi financé est une attaque odieuse envers les nôtres.

Les guerres impérialistes forçant des populations à l’exil pour échapper à la mort, tuent aussi nos adelphes. Les propagandes impérialistes les tuent une deuxième fois en niant leur existence, ou en capitalisant dessus pour justifier de leurs politiques guerrières.

La lutte contre les frontières, contre le racisme, le colonialisme et les impérialismes sont vitales peuvent participer à libérer les personnes trans colonisé-es, exilé-es, subissant les horreurs des guerres qui les tuent. Les politiques guerrières, fascisantes et colonialistes sont transphobes. Les luttes décoloniales et anti-impérialistes peuvent libérer et sauver des personnes trans. A nous de construire, encourager, soutenir et faire vivre un décolonialisme prenant en compte la libération des queers et des trans.

Nous voulons attirer votre attention sur les personnes trans et non-binaires qui existent partout, et qui loin de nous souffrent et meurent aussi. Nous ne voulons pas qu’elles soient oubliées et invisibilisées. Enfin, nous souhaitons aussi condamner l’homonationalisme, la récupération de nos luttes par l’extrême-droite permettant à certaines personnes LGBT d’en écraser d’autres.