Sur l’adoption de la loi asile et immigration

Loi asile et immigration

Effondrement républicain ou racisme d’état ?

Comme attendu, la macronie s’est une fois encore alliée aux LR et au RN pour passer ensemble un texte ignoble : la loi asile et immigration. Tandis que le RN et les LR, que plus rien ne distingue depuis longtemps, se gargarisent d’une victoire idéologique, l’exécutif lui a encore l’audace et l’indécence de parler d’en même temps, de « fermeté et d’humanisme » et de chemin démocratique. Pendant ce temps là, nous ne pouvons que constater une fois de plus la fascisation du champ politique français.

Si Borne se targue de permettre via cette loi la régularisation des travailleur.euse.s sans papiers, ce qu’elle ne nous dit pas, c’est que pour cela il faudra résider en France depuis 3 ans, avoir travaillé au moins 12 mois dans un secteur en tension et que ces régularisations se feront au cas par cas par la préfecture, le tout pour un titre de séjour d’un an. Sans parler des quotas sur le nombre de titres de séjour délivrés qui seront fixés par le Parlement.

Toujours sur les titres de séjour, cette loi s’attaque aussi aux étudiant.e.s qui devront désormais prouver le « sérieux » de leurs études et payer une caution fermant la porte des universités françaises à celleux qui ne sont pas issu.e.s de familles bourgeoises. Les étranger.ère.s malades sont aussi concerné.e.s par ce durcissement, si le traitement existe dans leurs pays d’origine (même s’il est inaccessible) alors pas de soins, démerdez-vous, et si titre de séjour il y a, la prise en charge par la sécurité sociale ne sera plus universelle.

Quant à l’AME (Aide Méciale d’État), si elle n’a finalement pas été supprimée par ce texte, Borne annonce déjà vouloir repenser le dispositif en 2024 pour ravir la droite.

Obsession de la droite toujours, le regroupement familial est encore une fois durci, il faudra désormais attendre 2 ans pour ne serait-ce qu’entamer des démarches. Plus dangereux encore, le droit du sol ne sera plus automatique et sera refusé si lae mineur.e est sujet.te à une condamnation.

Retour aux années de plombs, cette loi vient aussi rétablir le délit de séjour irrégulier, ce qui provoquera de multiples amendes, arrestations, placements en CRA et donnera une fois de plus des raisons de faciliter l’expulsion des exilé.e.s. Il y aura également une exclusion totale d’accès des hébergements d’urgence pour les personnes sans papiers sous OQTF. Et désormais, il sera possible de déchoir de sa nationalité une personne ayant commis un homicide sur une personne dépositaire de l’autorité publique, au hasard un flic.

Pour finir sur ce triste descriptif, cette loi vient nourrir l’extrême droite et son idée de préférence nationale en limitant les allocations familiales, l’APA et les APL selon des critères de présence sur le territoire durcies, et instituant une différence entre celleux qui travaillent qui ne devront attendre “que” 30 mois et les autres qui devront résider depuis 5 ans sur le territoire. Bref, cette loi s’appuie et renforce encore une fois le racisme d’État.

Car oui, cette loi s’inscrit dans un contexte et ne sort pas de nulle part, elle n’est pas non plus le simple fruit d’une fascisation récente de la france, mais bel et bien de l’histoire de la République française.

Cette même République qui a colonisé et gère toujours ses territoires extra-marins comme des colonies, qui essaie coûte que coûte de maintenir son influence sur ses anciennes colonies via la France-Afrique. Cette même République qui, si elle se vante d’apporter ses lumières humanistes au monde, n’a fait que nourrir dans un premier temps le racialisme (l’étude des « races humaines ») pour justifier son appropriation des ressources et son exploitation des corps non-blancs, puis mis en place des contrats sociaux racial tel que le code de l’indigénat pour maintenir son emprise sur Les peuples colonisés. Cette même République qui a produit Vichy et ses lois antisémites. Cette même République universelle qui a spolié l’autonomie des luttes antiracistes pour pouvoir maintenir son racisme d’état (Touche pas à mon pote, SOS Racisme).

Il serait impossible de citer toutes les lois racistes promulguées : des restrictions du droit d’asile aux trop nombreuses lois immigrations. À chaque fois, elles tricotent par-ci, détricotent par-là, mais dans l’ensemble la tendance générale a toujours été au durcissement ; accompagnant par la même le bon vieux racisme républicain.
Chaque loi précarise encore plus les personnes immigrées avec ou sans papiers, compliquant leurs quotidiens et rendant plus difficile la sacro-sainte intégration soi-disant recherchée. Les logiques exploitatrices des personnes immigrées se font également toujours pesantes, car les débats de fond (y compris ceux portés par la gauche institutionnelle) différencient toujours le « bon » et le « mauvais » étranger, à savoir celui qui travaille et celui qui est assisté, en le soumettant au chantage aux papiers, aux logements, aux soins, à l’éducation.

Outre les lois immigration, depuis plus de trente ans, les lois racistes et islamophobes s’enchainent allant de la loi contre les signes religieux ostentatoires, dit loi sur le voile de 2004, à celle sur le séparatisme en 2021, en passant par l’accumulation de lois racistes sous prétexte sécuritaire en particulier depuis les attentats de 2015. Rappelons qu’une grande partie de ces lois ont été passées sous des gouvernements dit de gauche qui n’ont fait qu’accompagner les politiques racistes.

Arrêtons de parler de dérive républicaine, la République est structurellement raciste et permet depuis toujours les politiques coloniales. Au lieu d’avoir honte pour des valeurs égalitaires jamais appliquées, nous devons lutter concrètement pour le droit des personnes exilées et/ou racisées. Quand nous entendons des syndicats ou des partis s’offusquer de cette loi et vouloir désormais lancer un mouvement social d’envergure, quelle indignité ! Depuis plus d’un an, les premier.e.s concerné.e.s et les organisations qui les soutiennent essaient de lancer un mouvement autour de cette énième loi immigration, sans que jamais ces mobilisations n’aient été réellement soutenues et visibilisées par les partis et syndicats de gauche – et ça vaut aussi pour la mouvance autonome dont nous faisons partie.

Il existe des luttes victorieuses qui sont toujours soit invisibilisées, soit utilisées comme token par les partis et syndicats de gauche sans que ces derniers viennent s’investir dans ces luttes. Récemment, les gilets noirs et les collectifs des sans papier.e.s 75 ont obtenu une victoire. Après avoir construit patiemment une unité parmi les ouvrier.e.s, iels ont occupé le chantier, Pour les JO 2024, porte de la chapelle. Puis ont négocié avec la mairie Pour obtenir la régularisation de toustes les grévistes.

S’il faut se réjouir de cette victoire, elle ne peut se suffire, car seule une lutte sur le plan national pourrait améliorer durablement les conditions matérielles d’existences des personnes sans papier, qu’elles travaillent ou non, elles qui subissent le pire de ce que produisent nos systèmes capitalistes.

Hier à Rennes, nous étions plus de 2500 à défiler contre la nauséabonde loi Darmanin, c’est bien et nécessaire de se réveiller maintenant, mais un coup d’éclat ne suffira jamais et seule une mobilisation massive et continue pourra aller au delà des luttes sectorielles et contrer l’hégémonie culturelle de l’extrême droite. Si on prétend vouloir lutter sur ces sujets, il est temps d’écouter et de rejoindre les luttes des personnes concernées au lieu de rester dans un antiracisme moral qui s’indigne quand une loi passe, à savoir quand le combat est déjà perdu.

Les politiques racistes et fascisantes ne s’arrêteront pas d’elles-même et les politiques qui concernent les étranger.e.s sont toujours un laboratoire pour précariser la société, il nous est nécessaire de construire de fortes mobilisations antiracistes, sociales et antifacistes, alors mobilisons-nous.

TDoR 2023 – Prise de parole

Les politiques guerrières, fascisantes et colonialistes sont transphobes.

Les luttes décoloniales et anti-impérialistes peuvent libérer et sauver des personnes trans.

Imaginez.

Des cadres de vie bouleversés par la guerre. Des vies trans et enbies bouleversées par la guerre. Pour les personnes transfems, il y a le risque qu’elles-se fassent enrôler pour le front. Parmi les hommes, cis bien entendu. Une société patriarcale attend d’être à genoux avant de confier sa défense à des femmes. Mais elles seront des femmes, trans, subissant la transphobie de leurs « frères d’armes*, et les horreurs de la guerre.

Mais même en n’étant pas envoyé-es au front nos adelphes subissent les bombardements, les rationnements, notamment sur les médicaments, les lois martiales, et les réactions LGBTIphobes émergeant ou s’amplifiant.

Leurs existences sont de toute manière instrumentalisé-es, tout autant par des camps politiques se prétendant leurs défenseurs mais qui n’ont en tête que du pinkwashing nationaliste pour faire d’elleux des bon’nes patriotes ; que par des camps politiques les étiquetant comme adversaires intérieur-es comme exterieur’es, déviant’es, ennemi-es des valeurs traditionnelles et de la Patrie. Intégrismes religieux et discours déshumanisants sont toujours bien pratiques pour justifier des pires sévices. Flicage, exclusion de l’espace public, thérapies de conversion, ou pire encore. Nos adelphes craignent pour leur vie, pour la vie de leurs proches, iels craignent l’occupant et ses exactions. Iels craignent l’occupant et ses velléités colonisatrices.

Car le colonialisme n’apporte que fractures et violences malgré ses prétentions d’apport du progrès, d’une bonne morale, voire de “civilisation », tant qu’il y est. Il instrumentalise à nouveau l’existence de nos adelphes trans, pour assoir sa domination. Soit il se sert d’elleux comme tokens pour déshumaniser un peuple, ou les présentent comme des êtres à sauver de leur propre peuple ; soit il encourage la transphobie à leurs égard et c’est alors elleux qui sont déshumanisé-es.

Le colonialisme n’est jamais émancipateur, malgré ses plus beaux masques et images de propagande pailletés. Il peut autant effacer l’existence des trans et plus largement des LGBT, comme il peut opposer nos adelphes : entre colons et colonisé’es, bon’nes trans, mauvais-es trans, civilisé-es, sauvages.

Le LGBT colon, il vient en soldat poser fièrement, drapeaux arc-en-ciel à la main, sur les ruines d’une ville qu’il vient raser, après avoir massacré sa population.

Parmi cette population : des queers, des trans, nos adelphes: Voilà à quoi ressemble la libération LGBT promise par le colon se prétendant défenseur des LGBT, qui les écrase sous ses bombes “Au nom de l’Amour”.

Mais revenons aux personnes trans. Imaginons qu’elles parviennent à fuir leur pays en guerre, et qu’elles se retrouvent à la frontière, face aux gardes, présentant leurs papiers. Que leur identité, prénom et genre soient à jour ou non sur leurs papiers, nos adelphes risquent les humiliations, le rejet, les violences. C’est systématique. C’est déjà la merde les papiers quand t’es trans, alors imaginez pour les trans réfugié’es, avec ou sans papiers.

Qui sait, cette violence ou les politiques internes du pays à passer les forceront à la clandestinité. Et après le passage des frontières, si elles parviennent à les passer, les galères continuent. L’enfer administratif que rencontrent toute personne exilée est à nouveau plus complexe avec des papiers mal adaptés, quand papiers il y a. Les violences administratives, qu’elles soient d’ordre racistes, transphobes, ou les deux, la violence des camps de réfugié’es, etc, nos adelphes les subissent tous les jours.

Imaginez, les flics qui les traquent, les contrôlent, et peuvent de-les jeter dans un CRA, un Centre de Rétention Administrative. C’est un joli nom pour parler de camp de concentration pour personnes exilées avant leur expulsions vers le pays qu’elles ont fui. Si ces gens ont quitté-leur pays c’est bien souvent pour y fuir la guerre, la répression, et bien souvent dans le cas de nos adelphes, les LGBTIphobies, et dans le cas des personnes trans, la transphobie.

Oui des adelphes sont expulsé-es vers la mort, c’est une réalité. Les frontières et les politiques migratoires tuent. En cela les frontières et les politiques migratoires, non contentes d’être racistes et assassines, sont LGBTIphobes, et transphobes.

Et même si ces adelphes exilé-es arrivent à rester sur le territoire, voire parviennent à être régularisé’es, iels ont tout risque de subir les politiques fascisantes qui font leurs choux gras dans bien des pays dits progressistes, développés, en paix. Les tafs précaires, les agressions de rue sont le quotidien des trans exilé-es. Leurs taf et leurs capacités de revenus sont attaquées et complexifiées. Les rares lieux, réseaux et communautés de soutien existant seront souvent ignoré-es par beaucoup de gens. Nos adelphes sont délogé-es quand les flics viennent expulser leurs camps de fortune avec la violence policière qu’on leur connaît, ou quand-ces mêmes sales flics viennent péter les squats queers qui offraient un peu de logis et de soutien. Nos adelphes ont moins sinon pas du tout accès aux réseaux de soin et de santé, et ça les met d’autant plus en danger et en détresse.

Toutes les politiques répressives envers les exilé-es sont transphobes, parce que les populations trans ont bien des raisons de vouloir fuir et passer des frontières dans l’espoir d’une vie meilleure.

Toutes les politiques participant au maintien et au renforcement de nouvelles frontières sont des attaques directes contre nos adelphes. Chaque mur, chaque rideau de fer, chaque grillage barbelé ainsi financé est une attaque odieuse envers les nôtres.

Les guerres impérialistes forçant des populations à l’exil pour échapper à la mort, tuent aussi nos adelphes. Les propagandes impérialistes les tuent une deuxième fois en niant leur existence, ou en capitalisant dessus pour justifier de leurs politiques guerrières.

La lutte contre les frontières, contre le racisme, le colonialisme et les impérialismes sont vitales peuvent participer à libérer les personnes trans colonisé-es, exilé-es, subissant les horreurs des guerres qui les tuent. Les politiques guerrières, fascisantes et colonialistes sont transphobes. Les luttes décoloniales et anti-impérialistes peuvent libérer et sauver des personnes trans. A nous de construire, encourager, soutenir et faire vivre un décolonialisme prenant en compte la libération des queers et des trans.

Nous voulons attirer votre attention sur les personnes trans et non-binaires qui existent partout, et qui loin de nous souffrent et meurent aussi. Nous ne voulons pas qu’elles soient oubliées et invisibilisées. Enfin, nous souhaitons aussi condamner l’homonationalisme, la récupération de nos luttes par l’extrême-droite permettant à certaines personnes LGBT d’en écraser d’autres.