prise de parole, 19 Novembre 2024
Le 2 septembre dernier s’ouvrait le procès de l’affaire des viols de Mazan, qui a légitimement pétrifié une partie de la France et toute personne engagée contre les VSS.
Comme beaucoup de gens, on a été horrifié par la gravité et l’ampleur des faits, mais on peut pas dire qu’on a été réellement surpris. Ni par le profil des accusés : des mecs blancs, de tout âge, de toute professions, des pères de famille, des gars bien inserés. Ni par leurs justifications : pour eux, Gisèle Pélicot n’existait pas, elle n’était que la propriété de son mari.
Quoi de plus banal dans un pays structuré par le patriarcat, où nous avons tous et toutes en héritage les schémas de pensée qui ont permi ça. On est tous et toutes tributaires d’institutions qui ne nous ont jamais détrompé sur le droit des hommes à posséder les femmes.
Les représentants de l’extreme droite, si pressés d’instrumentaliser chaque fait divers dans leur agenda raciste, n’ont pas eu grand chose à dire sur l’affaire des viols de Mazan. Ils et elles se sont réveillées un mois plus tard après le viol et le féminicide de Philipine Le Noir de Carlan, parce que son meurtrier présumé est marocain.
L’extreme droite et son effroi à double standard, en fonction de la race de l’agresseur, et des valeurs conservatrices qu’elles défendent, c’est quelque chose qui s’observe en permanence. Les 100 autres feminicides de l’année qui se sont fait dans le cadre de l’institution famille qu’elles cherissent tant, ça passe. Les milliers de cas d’inceste et de pedocriminalité ou la bourgeoisie est sur représentée, ça passe aussi pour elles. Les VSS sur les queer, les putes, les racise.es, elles s’en tapent. Les mecs blancs qui violent leurs meufs, leur potes, une inconnue mise a leur disposition par son mari, rien à branler. Leur beurre, c’est les agressions de rue faite par des « barbares », et elles ne parleront que de ça. Elles diront quil faut respecter les OQTF, sous entendu, virons le de France, les femmes hors de la France blanche on sen fout.
Mais ça, c’est la partie immergée du problème. La partie que nous, ici, on arrive à voir facilement.
Ce racisme de fond dans les luttes contre les VSS, c’est un fait concret qu’il faut attaquer !
Dans les institutions d’abord, des petites questions toute bête : pourquoi la justice française, pour des mêmes faits au même niveau de preuve, condamne bien plus les personnes racisées, et encore plus les personnes étrangère ? Pourquoi les stats du ministère de l’intérieur sont axées sur l’enjeu de l’immigration ? Pourquoi pas sur la pauvreté par exemple, ou bien le genre ? Pourquoi Macron, même hors stats, dit qu’il est visible que ce sont des étrangers qui agressent dans les transports en commun ? Pourquoi les flics surcontrolent et surinterpellent les personnes racisées ? Pourquoi la seule solution proposée par l’état dans la lutte contre les VSS, c’est un enfermement raciste dans des prisons raciste avec des matons racistes ?
Et puis, à gauche, chez nous les féministes, les LGBTI+, pourquoi on se fait pigeonner sans répondre à ces stats et arguments pourris ?? Pourquoi on laisse exister cette idée que les racisé.es produisent plus d’agression ? Pourquoi parfois même on en arrive à la légitimer en la justifiant par un essentialisme de classe ou évoquant la « santé mentale » : en disant « Oui mais vous savez, ils sont très précaires, ils ont vécu beaucoup de violence, alors ça s’explique ». Pourquoi on continue à revendiquer des peines plus lourdes alors qu’on sait que ça sert à rien pour changer la société et que ces peines sont mises en place avec des critères racistes ? Pourquoi on attaque pas frontalement les biais racistes dans nos pensées : la peur de groupe de gars racisé dans la rue, la pensée que l’Islam amène forcément au patriarcat conservateur, la croyance d’une sur-virilité chez les arabes et les noirs, en somme : la pensée les gars racisés ont une culture patriarcale plus forte.
On doit être capable de dire deux choses : de une, c’est faux que les racisé agressent plusse : pour les mêmes faits, aux même preuves, ils sont plus contrôlés, plus interpellés, moins bien défendus en justice et donc plus condamnés.
De deux, que le fond du problème c’est le patriarcat et de façon générale, les rapport de domination et d’oppression : une agression, c’est avant tout une prise de pouvoir. Sur le corps des meufs, des trans, des pede, des gouines, des personnes inter. Le viol et le meurtre de Phillipine, c’est l’expression extrême du patriarcat, du pouvoir de vie et de mort qu’a un homme cis het sur une meuf. Abolir le patriarcat, et les rapports d’oppression, c’est abolir un système de pouvoir. Et la prison ne change pas les systèmes de pouvoir, elle les renforce. Visibilisant ceux qu’elle enferme et masquant tout le reste renvoyé au banal, au quotidien.
Nombreuses sont les féministes, et toutes les personnes choquées par ce qu’à subit Gisèle Pélicot, à vouloir voir la justice rendue à sa juste mesure. Nombreuses parmi les personnes qui ont un jour été concernées, comme victime ou proches de victime de VSS, ont été ou sont toujours traversé par des désirs de punition exemplaires pour leurs agresseureuses, voir de vengeance. Ces affects sont légitimes.
Mais est-ce que c’est vraiment ça, rendre justice ? Est-ce qu’une amende répare, est-ce que la prison guérit ?
Puisque ce sont nos frères, nos pères, nos fils, nos collègues qui nous agressent et qui nous tuent, faudra t-il tous les enfermer pour vivre enfin en paix ?